En l’espèce, la CARPA de Nice (Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats) avait placé la somme de 3 millions d’euros sur les conseils de la société Héraclès Finance, société de courtage et conseil financier, dans un produit structuré par la société Exane Derivatives.
La banque émettrice et garante du placement de la CARPA ayant fait faillite, la CARPA a perdu le bénéfice de la majorité des sommes investies.
La CARPA a assigné la société Héraclès Finance et la société Exane Derivatives, reprochant à la première d’avoir manqué à son obligation de loyauté et d'information à l'égard de la CARPA celle-ci ayant changé la banque sans en avoir informé la CARPA au préalable et à la seconde, d’avoir structuré un produit non conforme au cahier des charges imposé.
Elle sollicitait notamment une indemnisation au titre de la perte de chance au titre de la perte de capital investi mais aussi au titre des gains manqués.
Dans un arrêt du 15 mars 2021, si la Cour d’appel a accueilli la demande de réparation au titre de la perte de capital investi, elle a refusé d’indemniser la CARPA de la perte de chance au titre des gains manqués aux motifs suivants :
« Si l’on peut admettre que la CARPA de Nice a subi une perte de chance au titre de la perte du capital investi, l’appréciation de sa perte de chance au titre des gains manqués doit tenir compte que cet investisseur a opté pour un produit n’apportant aucune garantie à ce titre s’agissant d’un produit financier structuré susceptible de générer des gains variables tant à la hausse qu’à la baisse.
La CARPA ne prouve en aucune façon qu’en 2016, elle aurait pu procéder à un investissement cumulant la garantie du capital et des gains certains à hauteur de ceux qu’elle invoque dans le cadre de son appel incident. »
La CARPA a formé un pourvoi en cassation. Dans un arrêt du 15 mars 2023, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel aux motifs que la Cour d’appel a statué « par des motifs impropres à démontrer l'absence de toute probabilité de gains, alors que toute perte de chance ouvre droit à réparation ».
Autrement dit, toute perte de chance ouvre droit à réparation, sauf s’il est démontré une absence totale de probabilité de gains, ce qui n’était pas le cas !
La Cour de cassation juge de manière constante que la perte de chance, même faible, est indemnisable (v. Cass. 1re civ., 16 janv. 2013, no 12-14.439, Bull. civ. I, no 2 ; Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, no 15-23.230 et 15-26.147).
Même si dans certains arrêts, elle paraissait parfois hésiter (Cass. 1re civ., 30 avr. 2014, no 12-22.567 ; Cass. 1re civ., 25 nov. 2015, no 14-25.109).
Cette solution est en outre cohérente avec l’essence même de ce chef de préjudice.
En effet, la perte de chance n’est indemnisée que lorsque le préjudice final constitue un préjudice incertain puisque lorsqu’il est certain, c’est la non-obtention de ce gain qui doit être réparée (Cass. 1re civ., 6 oct. 2011, nº 10-23.654).
En l’espèce, la CARPA n’était pas certaine de réaliser un bénéfice avec son placement. Elle ne pouvait donc pas être indemnisée de la non-obtention du bénéfice de son investissement. Son préjudice était donc limité à la seule expectative de gain. C’est donc à bon droit que la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel qui demandait de rapporter la preuve de « gains certains ».
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 mars 2023, 21-18.241
La banque émettrice et garante du placement de la CARPA ayant fait faillite, la CARPA a perdu le bénéfice de la majorité des sommes investies.
La CARPA a assigné la société Héraclès Finance et la société Exane Derivatives, reprochant à la première d’avoir manqué à son obligation de loyauté et d'information à l'égard de la CARPA celle-ci ayant changé la banque sans en avoir informé la CARPA au préalable et à la seconde, d’avoir structuré un produit non conforme au cahier des charges imposé.
Elle sollicitait notamment une indemnisation au titre de la perte de chance au titre de la perte de capital investi mais aussi au titre des gains manqués.
Dans un arrêt du 15 mars 2021, si la Cour d’appel a accueilli la demande de réparation au titre de la perte de capital investi, elle a refusé d’indemniser la CARPA de la perte de chance au titre des gains manqués aux motifs suivants :
« Si l’on peut admettre que la CARPA de Nice a subi une perte de chance au titre de la perte du capital investi, l’appréciation de sa perte de chance au titre des gains manqués doit tenir compte que cet investisseur a opté pour un produit n’apportant aucune garantie à ce titre s’agissant d’un produit financier structuré susceptible de générer des gains variables tant à la hausse qu’à la baisse.
La CARPA ne prouve en aucune façon qu’en 2016, elle aurait pu procéder à un investissement cumulant la garantie du capital et des gains certains à hauteur de ceux qu’elle invoque dans le cadre de son appel incident. »
La CARPA a formé un pourvoi en cassation. Dans un arrêt du 15 mars 2023, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel aux motifs que la Cour d’appel a statué « par des motifs impropres à démontrer l'absence de toute probabilité de gains, alors que toute perte de chance ouvre droit à réparation ».
Autrement dit, toute perte de chance ouvre droit à réparation, sauf s’il est démontré une absence totale de probabilité de gains, ce qui n’était pas le cas !
La Cour de cassation juge de manière constante que la perte de chance, même faible, est indemnisable (v. Cass. 1re civ., 16 janv. 2013, no 12-14.439, Bull. civ. I, no 2 ; Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, no 15-23.230 et 15-26.147).
Même si dans certains arrêts, elle paraissait parfois hésiter (Cass. 1re civ., 30 avr. 2014, no 12-22.567 ; Cass. 1re civ., 25 nov. 2015, no 14-25.109).
Cette solution est en outre cohérente avec l’essence même de ce chef de préjudice.
En effet, la perte de chance n’est indemnisée que lorsque le préjudice final constitue un préjudice incertain puisque lorsqu’il est certain, c’est la non-obtention de ce gain qui doit être réparée (Cass. 1re civ., 6 oct. 2011, nº 10-23.654).
En l’espèce, la CARPA n’était pas certaine de réaliser un bénéfice avec son placement. Elle ne pouvait donc pas être indemnisée de la non-obtention du bénéfice de son investissement. Son préjudice était donc limité à la seule expectative de gain. C’est donc à bon droit que la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel qui demandait de rapporter la preuve de « gains certains ».
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 mars 2023, 21-18.241